Montguyon : disparu, le tumulus
Le site a été rasé pour un parking. Était-ce ou non une sépulture néolithique ?Bernard Bordelais, là où se trouvait le « tumulus de la Goujonne » il y a quelques mois
© PHOTO T. J.
Lorsqu'il s'est aperçu que son « tumulus de la Goujonne » avait été rasé pour être remplacé par un parking, le sang de Bernard Bordelais n'a fait qu'un tour. Voilà pourtant des années que ce conseiller municipal alertait les responsables du chantier : il y avait peut-être là un important site archéologique.
Pour un œil non averti, l'endroit ressemblait à un gros tas de terre d'environs 4 mètres de haut et 15 mètres de large. Mais pour cet architecte passionné d'histoire locale et président de l'Association pour la sauvegarde du patrimoine de Montguyon, il s'agissait peut-être d'un tumulus datant de plus de 4000 ans avant notre ère. Une construction mégalithique servant probablement de sépulture et comparable au Dolmen de Pierre Folle, que l'on peut observer à quelques kilomètres de là. Car, à l'origine, celui-ci aussi était recouvert de terre et accueillait le corps d'un défunt, dont le crâne a été retrouvé à l'occasion de fouilles.
Un site recensé en 1945L'architecte ne s'est pas basé sur sa seule intuition. Sur le site Internet de la médiathèque de l'architecture et du patrimoine (dépendant du ministère de la Culture), il a retrouvé la fiche de recensement du site. Un recensement qui aurait été fait en 1945, sans aucune fouille ni mise au jour depuis.
En avril 2010, lors d'une réunion publique sur le futur chantier de la Ligne à grande vitesse (LGV), il avait averti les parties en présence de la possibilité de trouver là un vrai trésor archéologique. Afin d'éviter d'endommager le site, le tracé de la ligne avait donc été légèrement dévié. La Drac (Direction régionale des affaires culturelles) a d'ailleurs mené des opérations de diagnostic sur le tracé, mettant à jour deux sites archéologiques sur la commune : celui de la Longée (un vaste enclos protohistorique) et celui de Bois-Clair (un site paléolithique).
Seulement voilà : le tumulus de la Goujonne ne faisant plus partie du tracé, il était hors de l'emprise du travail des archéologues et n'a par conséquent jamais été fouillé. Le lieu est donc resté pour tout le monde… un tas de terre.
Mi-juillet, lorsque la route a été rouverte et que Bernard Bordelais a pu repasser à proximité du tumulus, il n'y avait plus qu'un parking, accueillant les voitures des ouvriers et un local en préfabriqué. Le lieu avait été soigneusement nivelé. Quant aux mégalithes censés dormir sous terre, elles auraient été enlevées et concassées.
Après moult relances auprès de la Drac, Bernard Bordelais a obtenu une réponse par mail, jeudi 20 novembre. Elle émane de Jérôme Primault, coordinateur des opérations d'archéologie préventive de la LGV. « S'agissant du “tumulus de la Goujonne”, écrit l'expert, […] je vous confirme qu'il se trouvait hors de notre emprise de travail. Sa destruction semble donc s'être opérée dans le cadre d'une extension de la LGV dont je n'étais pas informé et que, par conséquent, nous n'avons pas diagnostiquée. »
Un peu plus loin, Jérôme Primault fait part de ses doutes quant à l'existence d'un véritable tumulus : « Il faut rester très prudent quant à l'interprétation de ce monticule. Signalé comme “tumulus” en 1945, il n'a depuis été repris dans aucun inventaire ni synthèse sur le sujet. En outre, il n'apparaît pas dans la carte archéologique nationale. Donc, soit il s'agit d'un oubli, répété depuis plus de soixante ans dans la littérature scientifique, soit des spécialistes ont jugé que ce tumulus n'en était pas un. »
Alors, tumulus ? Pas tumulus ? Le mystère restera entier…
- Citation :
Note de l'Happah
[CHARENTE-MARITIME : DESTRUCTION DE SITE ARCHEOLOGIQUE?]
Lorsqu'il s'est aperçu que le possible «tumulus de la Goujonne » avait été rasé pour être remplacé par un parking, Bernard Bordelais passionné d'histoire locale et président de l'Association pour la sauvegarde du patrimoine de Montguyon, a déploré la possible destruction d'un site qui pourrait dater de 4.000 ans... Cela faisait des années que ce conseiller municipal alertait les responsables de chantiers, sur ce tumulus recensé en 1945. La DRAC reste prudente sur les hypothèses évoquées mais répond : "S'agissant du “tumulus de la Goujonne”, […] je vous confirme qu'il se trouvait hors de notre emprise de travail. Sa destruction semble donc s'être opérée dans le cadre d'une extension de la LGV dont je n'étais pas informé et que, par conséquent, nous n'avons pas diagnostiquée. »
Le lieu a été soigneusement nivelé. Quant aux mégalithes censés dormir sous terre, elles auraient été enlevées et concassées....
Source :
http://www.sudouest.fr/2014/11/25/disparu-le-tumulus-1747025-1391.php