Les Européens descendraient tous de 3 hommes ? Toi et moi, on serait cousins au 100e degré
Vous avez certainement un lien de parenté avec un Bulgare ou un Autrichien. Certes, un lien très très éloigné. Mais selon une récente étude, la majorité des Européens descendaient de trois hommes de l'âge de Bronze. Ce qui signifie que nous serions tous, sur notre continent, plus ou moins apparentés. Explications.Une étude publiée par "Nature Communications" vient de montrer que la plupart des Européens descendaient de trois hommes de l'âge de Bronze. Génétique et statistiques sont d'accord, nous sommes tous plus ou moins apparentés.
L'humanité est une grande famille, et pas seulement sur le plan spirituel. Si les communautés humaines ont divergé au cours de l'histoire, nous partageons toujours les mêmes ancêtres. Surnommés "Eve mitochondriale" côté femmes, et "Adam Y-chromosomique" côté hommes, ils sont les plus proches ancêtres directs communs de l'ensemble des humains qui peuplent aujourd'hui la planète. Bien sûr, on peut imaginer que les ancêtres en question datent d'une époque si reculée qu'elle en perd de son importance, mais selon plusieurs études récentes, les liens de parenté entre nous seraient beaucoup plus proches que l'on pourrait le penser.
Trois seigneurs de l'âge du BronzeSelon des généticiens de l'université de Leicester (Angleterre), les deux tiers des Européens modernes descendraient de seulement trois lignées paternelles remontant à l'âge du Bronze.
En étudiant l'ADN d'un échantillon d'hommes modernes représentant 17 populations différentes d'Europe et du Moyen-Orient, ces chercheurs ont pu construire un "arbre généalogique" des chromosomes Y européens, leur permettant ainsi de calculer l'âge des différentes branches représentées dans ces chromosomes, mais aussi d'estimer la taille des populations passées. Le résultat montre une explosion démographique voici entre 2000 et 4000 ans des Balkans aux Îles britanniques, et qui correspond historiquement avec l'apparition des civilisations de l'âge du Bronze.
"Les mâles dominants liés à ces cultures pourraient être responsables des distributions de chromosomes Y que nous voyons aujourd'hui", explique le professeur Mark Jobling, auteur principal de l'étude. Ce qui signifie globalement que les Européens d'aujourd'hui seraient à des degrés divers les descendants de trois rois (ou chefs de tribu) de l'âge du Bronze. Et on ne parle là que des descendants mâles, puisque l'étude s'appuie sur les chromosomes Y.
Descendants de O'Neill ou Gengis KhanCe n'est pas la première fois que des recherches mettent en avant l'héritage d'une poignée d'individus, voire d'un seul. Par exemple, une étude publiée en 2003 dans "The American Journal of Human Genetics" a évalué le nombre probable de descendants actuels en ligne directe de Gengis Khan. En examinant le patrimoine génétique de 16 populations asiatiques, de l'océan pacifique à la mer Caspienne, les scientifiques ont pu observer que 8% des hommes étaient porteur du bagage génétique d'un seul homme, originaire de Mongolie voici environ un millier d'années. L'étude conclut qu'environ 0,5% d'hommes dans le monde (1 homme sur 200), soit environ 16 millions de personnes, posséderaient aujourd'hui le chromosome hérité du conquérant Mongol.
Moins connu que Gengis Khan, Niall, Haut Roi d'Irlande à la limite du mythe et de l'histoire, aurait vécu au Ve siècle. Il serait à l'origine de la famille des Uí Néill (aujourd'hui O'Neill). Si l'on en croit des travaux menés par des scientifiques du Trinity College de Dublin, à peu près 3 millions d'hommes dans le monde (un Irlandais sur 12), descendraient du fameux Niall. En étudiant là encore le chromosome Y d'un échantillon de population, les généticiens ont pu parvenir à cette conclusion, en notant également que les personnes possédant ce fameux patrimoine génétique porteraient généralement soit le patronyme O'Neill, soit l'un des noms qui en seraient dérivés.
Une étude de 2013 sortie dans "PLOS Biology" avance des chiffres qui rapprochent également les ancêtres communs des Européens, évoquant le chiffre de 1500 ans dans le passé.
Charlemagne, Confucius, Nefertiti, nos ancêtres communs ?La génétique n'est cependant pas la seule science s'intéressant à la variété de nos ancêtres. Les travaux de Joseph Chang, du département de statistique de l'université de Yale, font référence en la matière. A la fin des années 1990, il a établi un modèle de la reproduction humaine au fil des générations, afin de déterminer à quelle époque se situait le fameux "ancêtre commun". Le principe qu'il a fini par établir est qu'à une certaine époque du passé, tout individu dont un descendant vit aujourd'hui était également l'ancêtre de tous les autres êtres humains vivant aujourd'hui. Le tout bien sûr étant de déterminer l'époque en question.
Les travaux du professeur Chang ont servi de base à des études ultérieures, dont celle emmenée par Douglas Rohde, du MIT, en 2004 (à laquelle a collaboré Joseph Chang). En prenant en compte une répartition aléatoire de la reproduction tout en prenant en compte les dynamiques historiques des populations, l'étude conclut que "les généalogies de tous les humains vivants se chevauchent de manière remarquable dans un récent passé", soit seulement quelques milliers d'années.
En recoupant génétique et statistique, un intéressant article de Steve Olson paru en 2002 dans "The Atlantic" résumait fort bien la problématique : presque tous les habitants du Nouveau Monde seraient des descendants de la famille royale anglaise, par exemple, et ce y compris ceux qui ont principalement des ancêtres africains ou indiens d'Amérique, et ce à cause des nombreux mariages intercommunautaires sur le continent américain.
De la même manière "Confucius, Nefertiti et à peu près n'importe quelle figure historique ancienne qui ait eu une descendance, même modérée, peut être comptée aujourd'hui parmi les ancêtres de tout le monde." Idem pour Charlemagne, dont chacun d'entre nous pourrait se revendiquer l'héritier...
Il faut préciser que les mouvements de population ont toujours été dynamiques, même dans les lieux les plus reculés. Migrations, révolutions, colonisations, guerres... tout cela a contribué à un brassage génétique pouvant emmener l'héritage des uns jusque chez les autres. Et comme le déclare Joseph Chang : "Même si nous ne sommes pas tous frères, le modèle suggère que nous sommes tous cousins au 100e degré". Si seulement nous pouvions nous en souvenir plus souvent...
Par Jean-Paul Fritz
Source :
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1372595-les-europeens-descendraient-tous-de-3-hommes-toi-et-moi-on-serait-cousins-au-100e-degre.htmlhttp://www.nature.com/ncomms/2015/150519/ncomms8152/full/ncomms8152.html